Yang Zhengguyang Mon cher ennemi

Publié le par magali duru

(Mon cher ennemi, Yang Zhengguyang, Editions Bleu de Chine, 2007)

 

Mon cher ennemi


 

C’était le titre et le thème du film de Goran Paskalejvic sorti en 2002 (décidément, pas un seul nom propre facile à épeler dans ce billet et de l’exotisme à foison !).





Normal, puisque le film, justement, était une adaptation  de Lao Dan shi yikeshu (titre original du récit de Yang Zhengguyang).

Passer de la Chine à l’Irlande, il fallait le faire, mais le réalisateur, qui est serbe, n’était pas à un… déplacement près.

 



Mais considérons l’original, ou plutôt sa traduction par Chen Xiangdong et Raymond Roche, publiée par Bleu de Chine en 2007.

 

Roman, dit l’éditeur, au mépris de la longueur du récit (89 pages bien aérées) et surtout du genre, puisqu’il s’agit là de toute évidence d’un conte paysan délayé en chapitres.

Si Maupassant avait été natif du Shaanxi, en Chine du Nord-Ouest, nul doute, il l’aurait écrit.

Même réalisme, même truculence parfois, même regard blasé, incisif, ironique sur l’incurie des notables locaux, même façon d’aborder les problèmes de société, la condition des femmes ou les travers humains, (cette heure de lecture vaut voyage en Chine…) même éclat soudain, de l’émotion, qui chavire en compassion pour des personnages à la fois agaçants, veules et touchants, le tout sur un fond de mélancolie chronique.

L’ennemi, c’est le voisin. Plus jeune, plus débrouillard, plus fortuné, puisqu’il fait le trafic des femmes, ce trafic rendu nécessaire aujourd’hui à la fois par l’absurde préférence du descendant mâle à la conception et la nécessité millénaire,surtout dans les campagnes où les croyances se doublent d’impératifs économiques, de trouver une épouse.

L’ennemi, c’est surtout une nécessité pour Lao Dan.

Rien qui vous tienne debout comme la haine, une bonne haine épaisse, injustifiée et tenace, quand vous êtes veuf, pauvre, noyé à vie sous la pluie qui tombe sans fin sur votre village et pourrit sur pied les choux de votre unique champ. Quand vous êtes de surcroît affligé d’un fils stupide et puceau qu’il faudrait tout de même marier avant qu'il ne vous rompe la tête avec ses accès dépressifs (quand Dadan déprime, il frappe sur un soc et Lao Dan attrape la migraine) ..

Du style (enfin de la traduction !) je dirais qu’il est généralement fluide, alerte, aérien, efficace, avec des ellipses intéressantes, on va dire que les deux ou trois phrases un peu grumeleuses sont des cafouillis de traduction. Deux ou trois notes de bas de page éclairent parfois le contexte socio-politique à bon escient sans alourdir.


En bref, un petit bonheur de lecture.

 

 

Lire le début

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Mon cher ennemi, Yang Zhengguyang, Editions Bleu de Chine, 2007

 

Publié dans Lector in fabula

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J
Merci, grâce à toi, le bonheur se partage.
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